Le 31 janvier, l’Ifremer a publié le bilan écologique 2019 des poissons débarqués par les bateaux français en métropole. La santé écologique des poissons capturés a été évaluée afin de connaître l’ampleur de l’exploitation durable en France. L’année dernière, 49% des poissons pêchés sur le territoire national provenaient de populations exploitées durablement. En 2000, il n’y en avait que 15%. Une belle progression, certes, mais est-elle suffisante ?
Pêche française : un bilan écologique positif ou décevant ?
49%, c’est un tout petit peu moins de la moitié, et loin d’être la majorité. Pourtant, c’est plus de trois fois le volume établi en 2000. L’Ifremer, Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, est plutôt satisfait de cette avancée. L’état écologique des poissons pêchés en France métropolitaine en 2019 est bien meilleur que deux décennies plus tôt.
Comment l’Ifremer analyse-t-il ces volumes ? C’est simple. L’année dernière, environ 500 000 tonnes de poissons ont été pêchés. Ces prises ont ensuite été étudiées par le CIEM (Conseil international pour l’exploitation de la mer), qui analyse l’état de santé écologique des espèces. En croisant ces données, l’Ifremer obtient alors le pourcentage des poissons puisés dans des stocks de populations sains.
Alors, oui, c’est vrai. 49%, c’est beaucoup plus qu’il y a vingt ans. Toutefois, 26% des prises françaises de 2019 provenaient de populations surpêchées et 2% de populations en voie de disparition. Par ailleurs, l’Ifremer ne prend pas en compte les prises accidentelles et la dégradation des habitats maritimes, causée par les méthodes de pêche modernes.
Qu’est-ce que des poissons en bon état écologique ?
Les résultats sont bien beaux, mais que signifie réellement « en bon état écologique » ? La santé écologique d’un poisson se mesure grâce au RMD, le rendement maximum durable. Il s’agit de la quantité maximale que l’on peut extraire, sur une longue période, d’une population sans affecter son processus de reproduction.
Parmi les espèces en bon état écologique, on compte notamment les Baudroies de la mer Celtique et du Golfe de Gascogne, l’anchois du même golfe ou encore la coquille Saint-Jacques de la Manche. Ceux-là représentaient 43% des volumes de poissons pêchés en France. Les 6% restant provenaient de populations en reconstitution ou dites « reconstituables » : thon rouge de l’Atlantique et de la mer Méditerranée.
Si la biomasse augmente fortement depuis quelques années, les reproducteurs sont néanmoins encore trop peu nombreux. Autrement dit, la quantité d’adultes en âge de se reproduire est inférieure à un bon RMD. Si ces espèces, qui menaçaient de disparaître au début des années 2000, sont aujourd’hui en voie de reconstitution, la pêche n’est-elle toutefois pas un frein à l’évolution de la biomasse ?
Qu’en est-il des populations qui s’effondrent ?
A l’heure actuelle, 23% des poissons pêchés proviennent de populations surpêchées. Si la filière de la pêche ne réagit pas, elle pourrait conduire à l’effondrement de ces populations. Le maquereau de l’Atlantique, la sardine du Golfe de Gascogne et l’églefin de la mer Celtique sont trois espèces menacées.
Le cabillaud de la mer Celtique et de la mer du Nord, ainsi que le merlan de la mer Celtique, représentent quant à eux deux populations déjà effondrées. S’il ne faut pas confondre « effondrement » et « extinction », cela ne minimise pas la pression de pêche observée sur certaines espèces. Si l’Europe avait bien pris des mesures contre les dégâts de la surpêche dans les années 2000, on constate un certain relâchement depuis 2014.
Le bilan 2019 de l’Ifremer ne prend pas en compte les pêches dans l’océan Indien, pratiquées par des navires français avec des méthodes destructrices de l’environnement. Pourtant, en France, 70% des captures sont réalisées avec un chalut de fond. Une méthode de pêche non sélective qui affecte les habitats et fragilise l’écosystème marin.
Le bilan de l’état écologique des poissons 2019, derrière ces chiffres plutôt positifs, cache une réalité plus compliquée. L’effondrement et le risque d’effondrement de certaines espèces surviennent dans un contexte déjà mal engagé. Le réchauffement climatique, en plus de l’effort de pêche, menace de plus en plus les espèces maritimes et l’écosystème de nos mers et océans.